La « récupération » des victimes de la pédérastie dans l’église commence en France | Société

Le mécanisme pour « réparer » et indemniser les nombreuses victimes de maltraitance d’enfants au sein de l’Eglise catholique en France est déjà en cours. Quatre mois et demi après qu’une commission indépendante a estimé 216 000 cas de pédérastie commis par des religieux français au cours des sept dernières décennies, l’Agence nationale indépendante de reconnaissance et de restauration (INIRR)l’instance mise en place par la Conférence épiscopale de France (CEF) pour accompagner les victimes et, le cas échéant, déterminer l’indemnisation à laquelle elles ont droit, a annoncé qu’elle gérait déjà les premiers dossiers.

Bien que la présentation publique ait eu lieu ce jeudi lors d’un événement à Paris et que toute l’équipe n’ait pas encore fermé ses portes, quelque 180 personnes ont déjà contacté l’INIRR ces dernières semaines alors qu’il était encore en formation pour demander une « reprise ». souffert, a révélé Marie Derain de Vaucresson, président de cette institution, financée par la Conférence épiscopale mais qui travaillera en toute indépendance. L’institution qui dirigera les trois prochaines années, avec un mandat renouvelable une seule fois, a déjà levé plusieurs millions d’euros auprès des diocèses pour faire face aux contreparties financières prévisibles.

Cependant, l’avocate expérimentée spécialisée dans les violences contre les mineurs et ombudsman des enfants a souligné que l’argent n’est pas la priorité de la plupart des personnes qui se tournent vers elle. En effet, « moins de la moitié » des dossiers déjà traités, qui devraient connaître une croissance exponentielle dans les mois et années à venir, donnent la priorité à la question financière lorsqu’il s’agit de demander réparation des torts subis, a-t-il assuré. Beaucoup ne demandent guère « un euro symbolique » et ce qu’ils recherchent, c’est seulement pouvoir parler de ce qu’ils ont subi, entendre des repentirs ou du moins confronter leurs agresseurs ou leurs chefs religieux qui à l’époque n’ont pas voulu ou su écouter .. à eux.

« Notre travail est très simple : il s’agit d’écouter, de reconnaître et de réparer », en commençant par une question apparemment simple : « Que voulez-vous que nous fassions pour vous ? De Vaucresson a résumé le travail de votre équipe lors d’une conférence de presse à Paris. Celui-ci sera composé d’un nombre encore à déterminer de « référents du dialogue », des personnes qui accompagneront individuellement chaque victime pour « entrer en dialogue et répondre à leurs revendications ». Les référents, dont le nombre dépendra du nombre de victimes qui se présenteront à l’INIRR, seront recrutés parmi d’autres avocats, spécialistes en psychologie et médiateurs.

Le président de la Ciase, Jean-Marc Sauvé (à gauche), remet le 5 octobre le rapport de pédérastie au président de la conférence des évêques de France, Eric de Moulins-Beaufort.Thomas Coex (AFP)

Chaque référent « écoutera individuellement » la victime, « sans la juger », et tentera de s’identifier à elle, non seulement aux abus dont elle a été victime, mais aussi aux « erreurs et manquements tant de l’Église que de d’autres personnes autour d’elle. » † Il évaluera également « l’impact à long terme sur sa vie » de ces abus, a expliqué De Vaucresson. Avec « les événements évoqués, les conséquences traumatisantes, les besoins et demandes antérieurs » de la victime, et toujours en coordination avec la victime, un rapport est préparé qui peut déboucher sur une « demande de reconnaissance et de rétablissement » qui à son tour est analysée par un « collège de experts ». C’est une instance permanente composée de 12 personnes – médecins, avocats ou encore magistrats – recrutées pour leur expérience dans des domaines tels que la santé, l’écoute des victimes ou l’accompagnement juridique.

Le « collège d’experts » prendra à son tour une « décision », qui peut aller d’une simple « déclaration forte et symbolique confirmant ce que la personne a vécu et les manquements, en particulier des membres de l’Église », jusqu’à demander une « compensation financière ». Les formes et les montants de l’indemnisation doivent encore être déterminés, a déclaré De Vaucresson, même s’il s’attend à ce que dans les mois à venir, ils commencent à « se conformer aux exigences de réparations financières » (l’expert préfère ne pas utiliser le mot compensation). au moins « jusqu’à l’été ».

Ce n’est pas l’INIRR qui doit distribuer l’argent. Cette institution transmettra ses recommandations au Fonds d’aide et de lutte contre la maltraitance des enfants (Selam), un organisme créé l’an dernier par la Conférence des évêques et qui a annoncé en janvier avoir réussi à lever les 20 premiers millions d’euros grâce à la vente de biens immobiliers et aux investissements de divers diocèses et diocèses. Cinq millions de ce premier poste ont déjà été consacrés au « soutien financier » des victimes tel que déterminé par l’INIRR et un autre million aux « actions de prévention et de mémoire ». Le Selam, créé sous le nom d’INIRR par la Conférence épiscopale, ne pourra pas discuter a priori le montant préconisé par les experts de l’institution de Vaucresson et ceux-ci n’ont à leur tour pas à justifier le chiffre présenté pour le fonds, a précisé le secrétaire général par intérim de l’INIRR, Daniel Gacoin.

Autre instance indépendante, la Commission de reconnaissance et de réparation (CRR), également mise en place en fin d’année suite au rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase, dans son sigle en français) par la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref), qui répondra aux demandes des victimes de la pédérastie dans les congrégations religieuses. Contrairement à l’INIRR, qui détermine la compensation à verser par le fonds de l’église, la CRR doit négocier une compensation financière avec la congrégation affectée dans chaque cas individuel.

De Vaucresson a reconnu que l’existence de deux institutions comparables « complique les choses pour les victimes », mais a expliqué que cette classification avait été choisie pour des « questions juridiques » sur la façon dont l’indemnisation devrait être convenue et distribuée, et il assure que les deux comités sont déjà en contact étroit et qu’un « portail commun » est même prévu pour accueillir les victimes avant qu’elles ne soient orientées vers l’une ou l’autre agence.

Philbert Favager

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