Une « révolution culturelle » conservatrice progresse en Russie – 11/08/2022

« Profiter de l’isolement pour renouer des liens avec nos traditions ». Avec son offensive en Ukraine de plus en plus isolée du monde occidental, la Russie a lancé une « révolution culturelle » conservatrice avec un zeste d’épuration artistique.

Alors que le président Vladimir Poutine s’est imposé depuis des années comme le gardien des « valeurs traditionnelles » face à un Occident qualifié de décadent, la crise avec les pays européens et les Etats-Unis donne un nouvel écho à cette rhétorique.

Et dans ce culte aiguisé des valeurs conservatrices, dont les piliers sont la foi orthodoxe, le patriotisme et la défense de la « vérité historique » vue par le Kremlin, le monde culturel est appelé à jouer l’un des premiers grands rôles à jouer. .

Pour la star de cinéma Sergueï Bezrukov, persona non grata dans l’Union européenne pour son soutien public à l’intervention militaire en Ukraine, « nous devons profiter de l’isolement pour renouer avec nos traditions ».

« Cela fait 30 ans que nous vivons dans l’univers Marvel américain. Il est temps de créer notre propre univers », déclare l’acteur de 48 ans, qui reçoit l’AFP au Théâtre Gubernsky de Moscou, qu’il dirige.

« Retourner en URSS est impossible, mais il est possible de reprendre confiance en la Russie (…) et d’arrêter de s’attaquer à nos vraies valeurs », ajoute l’acteur. « Le mot ‘patriote’ ne devrait plus être une insulte », dit-il.

Comme lui, de nombreux Russes célèbres ont applaudi l’offensive en Ukraine et son virage conservateur.

« Les événements épiques auxquels nous assistons lancent une véritable révolution conservatrice », a déclaré Eduard Boyakov, créateur du festival de théâtre de protestation « New Drama » et désormais fervent partisan de l’opération militaire.

En revanche, les célébrités qui critiquent ouvertement l’offensive en Ukraine figurent désormais sur une « liste négative ».

« Plus de 100 activités musicales ont été annulées depuis février », a déclaré à l’AFP Alexeï Kozine, directeur de Navigator Records, le plus grand producteur d’événements rock en Russie.

Fin juillet, le dirigeant de la banque parlementaire pro-Kremlin « Fair Russia », Sergueï Mironov, avait appelé à la création d’une « liste d’artistes patriotes » pour expliquer au public « qui est qui dans l’art russe aujourd’hui ».

En attendant la liste, le gouvernement a commencé à s’immiscer dans le secteur.

Fin juin, le maire de Moscou a entériné des contrats avec les directeurs artistiques de trois théâtres New Drama, dont le Gogol Center du réalisateur Kirill Serebrennikov, contre l’offensive en Ukraine.

« Les contrats arrivaient à expiration », a justifié la ville, qui avait déjà annoncé cinq fusions de salles en mars pour « optimiser » le dispositif.

« Le pouvoir ne veut plus d’art provocateur, il veut un art calme, voire terne, mais un art qui donne de la sécurité », a déclaré à l’AFP Valéri Pecheikin, dramaturge au Centro Gogol. « En conséquence, le théâtre reviendra aux grands classiques, le cinéma aux comédies muettes et les musées aux expositions équilibrées », a-t-il déclaré.

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© Agence France Presse

Sharon Carpenter

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