Quand Annie Ernaux aimait un jeune homme de 30 ans son cadet – 28-11-2022 – Tati Bernardi

Au moment où j’écris cette critique, l’écrivain français annie Ernauxlauréat du dernier prix Nobel de littérature et principale attraction de Tourner autour cette année il arriverait déjà à l’aéroport de Guarulhos, de retour dans son pays. Je n’étais pas à Paraty, mais l’information provenant d’amis écrivains et journalistes est qu’en plus de l’agitation causée par ses livres et discours déjà célèbres à la foire, la générosité et la simplicité de l’auteur se sont également énormément démarquées.

Annie n’hésitait pas à partager une table avec d’autres auteurs, elle a signé des centaines de livres (elle était la meilleure vente de l’événement) et même, à 82 ans, a accepté de poser pour un nombre infini de photos (bien qu’elle n’ait pas je n’aime pas ça, ce qu’elle a confié à son entourage).

Alors, avec une telle disponibilité, elle écrit aussi. Toute sa complexité, sa sensibilité et son érudition sont données à qui le veut. Sur un plateau simple mais en miroir. Elle est là, pour toi, un Prix ​​Nobel de littératurelui offrir la fidélité par la transparence et, courageux, libre et gigantesque, la plus belle chose qu’un écrivain puisse offrir : se dire d’exister, et non de simples exercices de style.

J’étais avec elle au dîner dimanche soir (27). J’ai pratiqué trois questions en français (je l’ai pris dans un petit coin). J’ai décidé de n’en faire qu’un : « Les hommes ont-ils peur de toi ? Mais j’étais moi-même terrifiée et je n’ai pas pu dire un mot à celle qui est aujourd’hui mon auteur « autosociobiographique » préféré aux côtés de Marguerite Duras et d’Édouard Louis.

Lorsqu’elle parle d’elle-même, Annie écrit sur les relations familiales et de classe ainsi que sur le contexte social et politique de la décennie référencée dans chaque ouvrage. Il est d’usage qu’elle nous dise, dans une phrase simple, courte et directe, quelque chose d’apparemment banal sur son humeur du jour, et cette construction laisse le lecteur tellement rassasié qu’il a un panorama très large de ce qui a été pensé, en la France de cette année-là (probablement mondiale), sur le féminisme, l’amitié, l’amour, la politique, la maternité, le vieillissement et le plaisir.

Dans ce livre très court « Le Jeune Homme » (je l’ai terminé en moins d’une heure), Annie parle de sa relation, âgée de 54 ans, avec un étudiant « fougueux et dévoué », de 30 ans son cadet, qui vit dans une petite, appartement froid et inconfortable : « Je faisais souvent l’amour pour me forcer à écrire. Je voulais, dans le sentiment de fatigue et d’impuissance qui suivit, trouver des raisons de ne plus rien attendre de la vie. Je nourrissais l’espoir que, jusqu’à la fin du l’attente la plus violente de toutes, celle de l’orgasme, je pouvais être sûr qu’il n’y avait pas d’orgasme plus intense que d’écrire un livre. »

Les novices comme les initiés de l’œuvre d’Ernaux doivent sans doute se demander comment il est possible pour un écrivain de faire rentrer absolument tout ce qui compte vraiment (le désir et la mort) dans un récit aussi concis et transitif. Sans aucun effort nous nous retrouvons devant un joyau rare : « J’avais la sensation de ne jamais sortir d’un lit, le même depuis mes dix-huit ans, mais dans des endroits différents, avec des hommes différents et indiscernables l’un de l’autre ». Quelque chose de gros et de lent, malgré les 56 pages stupéfiantes. C’est aussi dérangeant, malgré le fait qu’il semble que l’auteur se tient devant vous, dans un café, vous donnant des informations légères et banales, pendant que vous attendez que quelqu’un vous annonce une nouvelle importante.

Observant les gestes et réflexes de son petit ami, « conditionné par un manque d’argent constant et héréditaire », l’auteur suppose qu’elle n’aurait jamais eu de relation avec lui dans sa jeunesse : « Je ne voulais pas être dans un garçon les marques de mes humbles origines ». Et qu’il ne voyait que maintenant la beauté d’être à côté de quelqu’un avec qui il pouvait « jouer la pièce de sa jeunesse », et qui était « le porteur de la mémoire de son monde natal ».

Quand Annie Ernaux arpente les rues avec son compagnon et voit tant de regards choqués et indignés (fruits d’un machisme qui célèbrerait un homme plus âgé avec une fille dans la situation inverse), Annie Ernaux en conclut qu’elle n’a ressenti aucune trace de honte, mais une formidable sentiment de victoire.

Belle Annie descendant un escalier, une belle promenade sur la plage et enfin l’ombre d’un couple, main dans la main, dessinée sur la mer. Ce sont des photos sélectionnées par l’auteur, à partir de l’époque exacte où elle a vécu le roman raconté dans le livre. Pour moi, et j’imagine d’autres passionnés de littérature, faire face à ces images à la fin du livre équivaut à une expérience lysergique.


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Godard Fabien

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