La surutilisation de la technologie peut affecter la capacité des enfants à écrire, affirment les enseignants | Éducation

L’impact de la technologie influence l’apprentissage des enfants dans les écoles — Photo : Unsplash

De plus en plus d’étudiants ont du mal à écrire à la main. Le constat semble faire l’unanimité auprès des enseignants et des parents, tant en France qu’au Brésil. La raison principale : l’usage excessif des nouvelles technologies, comme les tablettes et les smartphones, qui ont habitué les enfants et les adolescents à l’écriture numérique. Dans un entretien à RFI, des experts alertent sur les dangers de ce phénomène, lourd de conséquences sur les compétences rédactionnelles.

« Il ne sait pas tenir correctement un crayon », explique Luana, mère d’un garçon de six ans qui a des difficultés à apprendre à écrire à l’école.

La Brésilienne basée en France a déclaré à RFI que l’enfant s’était habituée très tôt à manipuler les commandes d’une tablette et d’un jeu vidéo, ce qui avait fini par affecter sa coordination motrice. Selon Luana, le garçon reconnaît les lettres et possède de solides compétences en arithmétique, mais son interaction manuelle est entièrement axée sur les médias numériques, dont il maîtrise habilement l’utilisation.

« C’est plus facile pour lui de taper quelque chose que de tenir un stylo. Après tout, ces technologies rendent tout plus facile. Vous pouvez écrire avec un seul doigt. Même la peinture devient plus facile », note-t-il.

La difficulté à laquelle Luana est confrontée avec son fils et qu’elle a tenté de résoudre avec l’aide de pédagogues et de psychologues ne fait pas exception. Le phénomène semble devenir une règle dans les salles de classe, comme le raconte à RFI Roxanne, enseignante de français, qui enseigne de la 5e à la 9e année.

« Je remarque que les étudiants non seulement écrivent plus lentement, mais que la pratique les dérange aussi beaucoup. Par exemple, lorsqu’ils doivent recopier des leçons courtes d’une dizaine de lignes, beaucoup de gens se plaignent souvent et me demandent s’ils doivent écrire beaucoup plus », rapporte l’enseignant.

Pour ne rien arranger, l’enseignant constate que moins d’exercices d’écriture ont lieu pendant les cours. « J’en tiens le système scolaire français pour responsable. Face à des programmes de plus en plus denses, des classes surchargées, des élèves aux profils différents et aux difficultés d’apprentissage différentes, les enseignants ont moins de temps pour s’entraîner à l’écriture », déplore-t-il.

Exercices de calligraphie pour la 4ème année du primaire

Dans les écoles du Brésil, le panorama n’est pas très différent. Flávia Machado est enseignante de 4ème année à Tubarão (SC). Elle a remarqué que les élèves avaient des difficultés à écrire et a déclaré qu’elle était obligée d’enseigner des exercices de calligraphie – une technique auparavant utilisée pour les enfants qui commençaient à apprendre à lire et à écrire.

« Ils ne savent tout simplement pas comment écrire correctement les paroles. Par exemple, on sait que si l’on veut écrire à la main, on commence de bas en haut, de gauche à droite. Mais j’ai des étudiants qui ne suivent pas cet ordre linéaire lorsqu’ils écrivent. Ils dessinent les lettres de manière incohérente », dit-il.

Flávia affirme que l’écriture manuscrite est requise pour le travail en classe et les devoirs, mais les familles elles-mêmes sont réticentes à cette stratégie. « Lorsque j’envoie à mes enfants un sondage à faire à la maison, les parents m’envoient un message et me demandent : « Peuvent-ils le saisir pour pouvoir le terminer plus rapidement ? » », dit-il.

Interdiction des smartphones dans les écoles françaises

Depuis la rentrée 2018, la France a interdit l’usage des smartphones personnels dans les écoles, au grand soulagement des enseignants. Par ailleurs, suite à plusieurs avertissements de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), de nombreuses familles ont également pris l’initiative de limiter l’utilisation des nouvelles technologies par les enfants et adolescents à la maison. C’est le cas de Patricia, une Brésilienne vivant en France et mère de deux filles âgées de 11 et 14 ans.

De nombreuses familles ont également pris l’initiative de limiter l’utilisation des nouvelles technologies par les enfants et les adolescents à la maison. — Photo : Unsplash

« Mes filles n’ont aucune difficulté ni aucune résistance lorsqu’elles écrivent, car dès leur plus jeune âge elles étaient habituées à ne pas utiliser les nouvelles technologies. Ils étaient également toujours encouragés à lire des livres, à signer des autographes et à jouer à des jeux non électroniques tels que des dominos et des puzzles. Il a toujours été clair pour moi que plus tard ils découvriraient les écrans portables, mieux ce serait », dit-il.

Patricia, ingénieure spécialisée en sciences de l’éducation, est enseignante dans un lycée professionnel privé du sud de la France, où elle enseigne à des élèves de 13 à 21 ans. Pour elle, le plus important est de savoir utiliser les nouvelles technologies, mais sans les interdire.

« Je le transmets à mes filles et à mes élèves : il existe d’autres façons de passer notre temps que derrière des écrans portables et virtuels. Mais je ne suis pas favorable à l’interdiction des nouvelles technologies. Par exemple, ils constituent un puissant allié dans l’éducation des personnes handicapées. Le plus important est que vous sachiez transformer les nouvelles technologies en quelque chose de positif dans votre vie », conseille-t-il.

Ni diaboliser ni idéaliser

Les experts interrogés par RFI partagent la position de Patricia. « Je pense que nous ne devrions ni diaboliser ni idéaliser. Pour moi, il est très important d’utiliser les deux alternatives lors de l’apprentissage. Il faut savoir équilibrer », explique la graphothérapeute Agnès Daubricourt.

Le spécialiste, auteur du livre « Jeux d’Éveil à l’Écriture », développe et applique des techniques personnalisées pour apprendre aux enfants à écrire et améliorer leur écriture. Selon elle, la difficulté à écrire fait de plus en plus partie du quotidien des enseignants et des parents. « Il est fréquent aujourd’hui de voir des enfants qui ne peuvent pas tenir un crayon de manière ergonomique, qui ont des difficultés à écrire », note-t-il.

Selon Daubricourt, outre les nouvelles technologies, d’autres facteurs peuvent également contribuer à compliquer le processus d’apprentissage, comme le manque de stimuli ou d’exercice.

« Les enfants n’utilisent pas assez leurs mains lorsqu’ils jouent, ils ne les manipulent pas assez : ce sont les effets de la modernité. Avant de laisser les bébés jouer par terre, ils rampaient et grimpaient… Mais aujourd’hui on a peur des microbes, de la saleté, alors les bébés restent statiques dans les poussettes. Ce qui se passe, c’est que les réflexes archaïques ne sont pas activés, les muscles ne deviennent pas plus forts et cela affectera l’apprentissage de l’écriture à l’avenir », estime-t-il.

Pourquoi est-il important de pouvoir écrire à la main ?

La psychopédagogue Larissa Fonseca, spécialiste du comportement et du développement des enfants et des adolescents, défend l’évolution de l’éducation en parallèle avec les innovations et les caractéristiques des nouvelles générations. Cependant, rappelez-vous que l’écriture manuscrite ne doit pas être ignorée car elle implique l’apprentissage d’habiletés psychomotrices fondamentales pour le développement sain et complet de l’enfant. « Pratiquer et pratiquer l’écriture ne mène pas seulement à l’apprentissage de l’orthographe. Ce sont des compétences qui vont bien au-delà du décodage des lettres et des mots », souligne-t-il.

Selon l’expert, écrire sur papier développe diverses compétences, comme la mémorisation, la compréhension et les capacités psychomotrices. « Lorsqu’un enfant écrit à la main, il enregistre mieux, réfléchit mieux et développe ses idées de manière plus organisée. L’apprentissage devient alors plus significatif et plus efficace », répète-t-il.

C’est pourquoi Fonseca conseille aux enseignants d’économiser les ressources des livres physiques, l’exercice de lecture, d’écriture et le sens de cet exercice. « L’importance de l’écriture a été perdue aujourd’hui. Beaucoup de gens pensent que parce qu’ils communiquent par e-mail ou WhatsApp, cela n’a plus de sens de pouvoir écrire à la main. Il est donc essentiel de revenir au sens de l’écriture comme quelque chose d’agréable et de significatif », estime-t-il.

Pour les familles, la psychopédagogue suggère que les pères et les mères encouragent leurs enfants à écrire plus souvent de manière ludique, sans que cet exercice ait le poids d’une obligation. «Écrivez-les sur des cartes postales, des cartes d’anniversaire, faites des listes de courses, des notes. Résiniser l’écriture manuscrite en tant qu’activité agréable contribue à promouvoir la prise de conscience et le lien avec cette pratique », conclut-il.

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Madeline Favre

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